Et si la littérature et les séries turques offraient d’autres chemins vers l’histoire ? Du roman L’île aux arbres disparusd’Elif Shafak à la dizi Vatanım Sensin, un regard croisé sur mémoire, transmission et identité, deux voies complémentaires pour raconter la Turquie autrement.


La mémoire qui vit : voix intimes et fresque nationale
Dans L’île aux arbres disparus (2021), la mémoire prend une voix inattendue : celle d’un figuier, témoin d’un amour contrarié sur l’île de Chypre et des blessures laissées par le conflit. À travers le destin d’Ada, adolescente londonienne, le roman fait affleurer les silences familiaux qui traversent l’exil et façonnent l’identité bien après la guerre.

Avec Vatanım Sensin (2016–2018), la mémoire devient fresque. Portée par des personnages emblématiques, la série plonge le spectateur au cœur des années 1912–1922, entre occupations, résistance et naissance d’une nation. Ici, le récit insiste sur l’expérience sensible, l’espoir, la perte, l’engagement, plutôt que sur une chronologie exhaustive.

Héritages et transmissions : du familial au collectif
Chez Shafak, l’héritage est intime : les non-dits parentaux deviennent le poids des enfants. Le roman montre comment la transmission se joue dans les silences, les gestes, la langue et comment elle forge, parfois à distance, un sentiment d’appartenance.
Dans Vatanım Sensin, l’héritage est collectif : patriotisme, courage, sacrifice circulent entre générations. Les personnages incarnent l’idée d’un devoir envers les vivants et les à-venir, donnant sens à la mémoire nationale autant qu’aux liens familiaux.
Une portée universelle, au-delà des frontières
Traduit et lu bien au-delà de la Turquie, le roman de Shafak transforme un récit situé (Chypre, diaspora) en réflexion universelle sur l’exil et la reconstruction. Diffusée hors de Turquie, Vatanım Sensin touche par son souffle romanesque et ses personnages, même auprès de publics peu familiers de l’histoire ottomane finissante.
Ce que lecteurs et spectateurs retiennent : amour, perte, espoir, identité. Des thèmes qui traversent les frontières et rappellent que ces récits dialoguent avec le monde.
Deux récits, une mémoire
De la voix d’un arbre qui se souvient aux trajectoires d’une famille en temps de guerre, littérature et dizi turques rappellent que l’histoire n’est pas qu’affaire de dates : elle se raconte. Ces récits montrent comment la mémoire circule, comment l’identité se tisse, et comment le passé trouve encore des mots pour parler au présent.
Article rédigé par Hiba Bouazza
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